Le livre de Chloé Grabli
Ce livre a d’abord été écrit pour formaliser des savoirs et des apprentissages acquis sur le terrain au cours de mission qui se sont déroulés tout au long d’une carrière dans le conseil. Le propos est d’expliquer comment mobiliser l’intelligence collective au service de la transformation des organisations. C’est une combinaison d’éclairages théoriques, d’expériences et de propositions méthodologiques éprouvées. Pour ce faire, le livre est en trois parties. Il regarde d’abord ce qu’est un projet de transformation puis la mise en œuvre de cette transformation et enfin les effets produits sur les personnes.
Les prémices de la transformation sont évoquées par le passage d’une conviction que « quelque chose doit changer » à la construction des raisons de ce changement, une fois le premier mouvement émotionnel dépassé. Pour ce faire, le CODIR doit alors aller à la rencontre des personnes concernées en restant ancré sur la raison d’être du changement. En effet, pour la réussite du projet, il est essentiel d’aligner les objectifs, les personnes et les processus. Ce qui ne se fait pas sans un leader qui va surmonter les réticences et éviter les démissions silencieuses.
Ce n’est pas de la science exacte même s’il faut repartir de la décomposition de la pensée systémique pour sentir, initier, créer et codévelopper. C’est un processus en cinq phases de la définition au déploiement avec des phases de tests, d’essais et d’expérimentations. Ce déroulement suppose de faire évoluer la culture qui peut être définie comme adaptation aux enjeux à relever aux trois niveaux culturels que sont les croyances ou des hypothèses sous-jacentes, les valeurs adoptées et les artefacts observables. Ce qui pose indirectement le lien culturel entre l’organisation et la société comme dans le cas de la culture hiérarchique taylorienne ou de celledu clan si le sens est premier. Est précisé ensuite les modalités pratiques d’évolution d’une culture (identification des pratiques et lieux de la transformation).
La suite de l’ouvrage, après ces rappels de ce qu’est une transformation, est consacrée à la mise en œuvre de la transformation. C’est là qu’intervient le point central du développement avec l’intelligence collective qui passe par l’union des différences. Concrètement, en réunissant plusieurs personnes nous annulons leurs biais cognitifs pour s’approcher d’une connaissance objective. Un certain nombre de règles sont énoncées pour réussir puis vivre cette expérience et la mener à terme. L’entraide et l’apprentissage sont au cœur de la démarche qui repose sur l’innovation.
Différents exemples de déploiement de l’intelligence collective précisent la démarche qui induit un développement individuel et collectif, ouvrent la partie 3 consacrée aux effets produits sur les personnes. Plusieurs aspects sont ensuite développés comme les cercles de pairs où le leader pose le cadre puis lâche prise, le corpo-working et l’importance des collectifs pour sécuriser et catalyser les apprentissages ou la modification du rapport au travail. Le livre se conclut sur les besoins fondamentaux auxquels répond l’intelligence collective avec la nécessité essentielled’équilibre entre le collectif et l’individuel. Une ouverture enfin est faite sur l’intelligence collective au service de l’homme et de la société au-delà des organisations.
L’interview avec Chloé Grabli
Pourquoi écrire ce livre ?
Pour formaliser des apprentissages autour de l’intelligence collective et pouvoir ainsi accompagner les leaders et les dirigeants en complément de l’action de conseil. Pour donner de la force au propos, mailler théorie, pratiques et méthodes. Car il y a un réel besoin de formation y compris des dirigeants. Ce constat vient de l’expériences de terrain.
L’intelligence collective est-elle applicable systématiquement ?
Elle ne s’applique pas partout. C’est au dirigeant d’évaluer avec son conseil s’il faut cheminer suivant ce processus ou si l’on peut faire plus court. Quand on ne sent pas le sujet ou la problématique, que l’on a du mal à fixer un cap, alors l’intelligence collective peut être une bonne solution mais elle prend du temps et exige certaines pratiques et processus.
Au fond, qu’apporte en plus l’intelligence collective ?
Elle est un facteur clé de succès dans la mesure où elle réalise l’alignement des sujets comme des personnes. Elle va permettre de répondre aux questions : qu’est-ce qu’on demande ? Qui va-ton déléguer sur le sujet ? Comment va-t-on choisir les bonnes personnes dans un groupe de travail ? Qui inclure pour avoir un échantillon représentatif sur tel ou tel sujet ?
Quelles sont les variantes ou les intelligences collectives spécifiques ?
Parfois, le besoin premier est de créer du neuf. Mettre ensemble des personnes différentes pour créer du futur est aussi une pratique de l’intelligence collective. On n’est pas très loin du « design thinking » ou d’autres pratiques comparables.
Quels sont les entreprises les plus concernées par l’intelligence collective ?
Il y a un engouement certain des secteurs des technologies pour lesquels l’innovation et l’adaptation permanente sont clés. Ce sont aussi les entreprises en mal de « lien social » qui sont concernées. Le spectre d’utilisation de l’intelligence collective est large comme celui des entreprises qui en ont besoin. Il va de l’élaboration du plan stratégique au transformations culturelles en passant par de nouvelles routines à implémenter.
Pour conclure, en substance, quel est le mot de la fin sur l’intelligence collective ?
C’est vraiment une solution sans égale si on ne sait plus par quel bout prendre le chantier de transformation. Si la phase de qualification s’annonce énorme, c’est aussi le moyen de bien viser et d’éviter d’aller trop vite sur des fausses pistes, Ce pourrait être une formule à essayer pour l’hôpital ou l’Éducation Nationale ! C’est aussi une bonne solution s’il y a un problème d’engagement des équipes. La règle d’or de l’intelligence artificielle pourrait se résumer à « cultiver la différence ».